Position dominante : nécessaire prise en compte des études produites en défense par l’entreprise poursuivie

Sarah Ouamara, 10/02/2023

Par un arrêt rendu le 19 janvier 2023, la Cour de justice de l’Union européenne vient d’apporter une précision importante pour les débats devant les autorités de concurrence.

Elle vient de juger que, lorsqu’une entreprise en position dominante produit une étude économique pour démontrer que la pratique qui lui est reprochée n’est pas susceptible d’évincer ses concurrents, les autorités nationales de concurrence ne peuvent pas écarter cette étude, sans exposer les raisons pour lesquelles celle-ci n’est pas pertinente.

Cette décision est intervenue à propos d’une affaire dans laquelle la société Unilever avait été sanctionnée le 31 octobre 2017 par l’autorité italienne de la concurrence par une amende de plus de 60 millions euros. Il lui était reproché d’avoir imposé à ses distributeurs des contrats types contenant des clauses d’exclusivité, sans possibilité pour eux d’amender leurs dispositions. Et ainsi, d’avoir abusé de sa position dominante sur le marché italien de la commercialisation de glaces en conditionnements individuels.

Sans analyser les études économiques produites par la société Unilever, qui s’employait à démontrer que ces clauses n’avaient pas eu d’effet d’éviction à l’encontre de ses concurrents, l’autorité italienne de la concurrence a estimé que ces pratiques contractuelles avaient restreint la concurrence. Le recours à des clauses d’exclusivité par une entreprise en position dominante apparaissant suffisant pour ce régulateur pour caractériser un usage abusif par Unilever de cette position.

Mais, la CJUE a considéré que les autorités nationales de concurrence avaient l’obligation d’examiner les preuves présentées par l’entreprise poursuivie pour abus de position dominante, afin établir que la pratique abusive qui lui est reprochée n’avait pas eu d’effets anticoncurrentiels. La CJUE s’était déjà prononcée en ce sens dans l’affaire Intel (CJUE, 6 septembre 2017, C-413-14), à propos des rabais d’exclusivité. Ce nouvel arrêt laisse penser que la charge de la preuve imposée aux autorités de concurrence pourrait s’appliquer à tout type de pratique abusive.

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